Yoshio SUGINO

Par Nicolas DE ARAUJO

 

 

Yoshio SUGINO (杉野嘉男) est né le 12 décembre 1904 à Naruto dans la préfecture de Chiba. Fils aîné de Yutaro et Seki SUGINO, descendants d'une famille autorisée à employer un nom et à porter une épée depuis l’ère Edo. Né légèrement plus petite que la moyenne, sa détermination à devenir fort commence dès son plus jeune âge.

A l'âge de douze ans, il débute l'étude des arts martiaux par la pratique du Kendo auprès de Maître Saneatsu SHINGAI (ex-samouraï, et un des responsables de la réforme du Kendo). Il étudie ensuite le Judo sous la férule du célèbre Maître Kunisaburo IISUKA, 10ème Dan du Kodokan, qui le recommande chaleureusement auprès du fondateur Maître Jigoro KANO.

Malgré sa petite carrure, 1m59 pour 56 kg, Yoshio devient rapidement un champion de premier plan du Kodokan et reçoit le Batsugun Shodan en 1922, qui est un 1er dan de Judo avec une mention spéciale pour les résultats exceptionnels obtenus en compétition.

En 1927, à l'âge de 23 ans seulement, il reçoit de Maître KANO l'autorisation d'ouvrir un dojo d'entraînement de Judo à Kawasaki : « le Kodokan Judo Shugyojo ».

On lui décerne le 4ème dan de Judo en 1928. Dès lors il reste invaincu en tournois, mais suite à une erreur d’arbitrage, il est déçu par la compétition et décide d’étudier d’anciens styles de Jujutsu sur les conseils du fondateur du Judo.

Yoshio SUGINO commence d’abord par étudier le Yoshin Koryu Jujutsu avec Genro KANAYA. Puis il découvre le Katori Shinto Ryu. En effet à cette époque Maître KANO invite au Kodokan des experts d’arts martiaux traditionnels, et notamment quatres Shihans de cette ancienne école, les maîtres Narimichi TAMAI, Sozaemon KUBOKI, Tanekichi ITO et Ichizo SHIINA afin d'initier ses jeunes gradés aux arts traditionnels et d'éviter que ceux-ci ne disparaissent.

C’est donc en compagnie notamment de Minoru MOCHIZUKI et de Jiro TAKEDA qu’il étudie les 12 pratiques de cette école : Ken-jutsu (techniques du sabre), Bo-jutsu (techniques du bâton), Naginata-jutsu (techniques du fauchard), Iai-jutsu, Ryoto-jutsu (techniques des 2 sabres), Kodachi-jutsu (techniques du petit sabre), Soo-Jutsu (techniques de Yari), Shuriken-jutsu (techniques du lancer de pointes), Ju-jutsu (technique de combat à mains nues), etc...

Délaissant petit à petit le Judo et conquis par l'art extraordinaire du Katori Shinto Ryu, il s'y adonne avec passion sous la direction de ces maîtres durant deux ans, puis il devient le disciple particulier de Maître SHIINA durant près de 10 ans.

Après avoir regardé une démonstration de Daito Ryu Aikijujutsu de Morihei UESHIBA, impressionné par ce qu’il vient de voir, SUGINO Sensei décide de s’inscrire au dojo de ce dernier. Grâce à une introduction de Yasuhiro KONISHI Sensei, il intègre le Kobukan Dojo en 1932. Yoshio y étudie durant une brève période et reçoit une autorisation d’enseigner en 1935, mais pas de grade ou de certificat car le fondateur n’en décernait pas à cette époque. Après le refus de Minoru MOCHIZUKI, O Sensei lui demande à son tour d’être son successeur mais Yoshio étant déjà marié et père de famille, il décline l’offre avec regrets…

En 1935, il débute l’étude du Yoshinki Ryu Jujutsu, par la suite Maître Kanaya MOTOAKI lui décernera le titre de Kyoshi.

Au milieu des années 30, Yoshio est très occupé car il dirige son dojo de Judo de Kawasaki et occupe différentes fonctions en parallèle. Il est moniteur de Budo à l’université de Chiba, enseigne le Katori Shinto Ryu à l’école élémentaire d’Asakusa, l’art du Naginata à Yokohama et le Judo à l’école secondaire de Keio. Puis en 1939, il devient instructeur de Judo à l’université de cette même ville.

SUGINO Sensei débute sa collaboration avec l’industrie du cinéma en 1937. Il fournit des instructions sur l’art de la lance pour un film d’Ogai MORI. Par la suite, il travail sur plusieurs productions théâtrales et fournit d’authentiques techniques martiales aux acteurs.

A la suite d'une brillante démonstration effectuée devant le prince impérial NASHIMOTO en 1940, Kinjiro IIZASA, 19ème soke du Katori Shintô Ryu, lui accorde l'autorisation d'enseigner. Le dojo de Kawasaki devient dès lors une branche de cette école.

Pendant la Guerre, la maison et le dojo de SUGINO Sensei sont détruits par des bombardements. Il se réfugie avec sa famille à Fukushima, où il continue de pratiquer les arts martiaux et fait usage de ses connaissances médicales pour aider les blessés. Durant cette période, Yoshio à la chance de n’être jamais appelé au front, et ce, malgré ses résultats élevés aux tests de conscription…les raisons exacts de son exemption restent toujours inconnues mais en tout cas, il se dit "content d’avoir été capable de passer les années de guerre sans tuer une seule âme".

Après le conflit, SUGINO Sensei rentre à Kawasaki et ré-ouvre sa clinique spécialisée dans les fractures afin de traiter les nombreux blessés de guerre. En 1950, SUGINO Sensei profite de la levée de l’interdiction des écoles d’arts martiaux pour ré-ouvrir son dojo de Kawasaki. Entretenant toujours des contacts réguliers avec Maître UESHIBA, il est le second à ouvrir une succursale de l’Aïkikaï dans son dojo, invitant même le Doshu, Kisshomaru UESHIBA, à y enseigner une fois par mois.

En 1953, Akira KUROSAWA à le projet de mettre en scène un drame de samouraïs et souhaite y intégrer une chorégraphie d’arts martiaux plus proche de la réalité. Il contacte le Ministère qui relaye sa demande à la société pour la promotion des arts martiaux classiques. En réponse, elle lui suggère Yoshio SUGINO du Katori Shinto Ryu et Junzo SASAMORI de l’Ono-ha Itto-ryu. Mais ce dernier doit se rendre en Europe pour enseigner son art et Maître SUGINO se retrouve donc l’unique chorégraphe du film…Son travail est acclamé par la critique et le public qui déclare "les 7 samouraïs" comme le premier film d’arts martiaux réaliste. Il continue de collaborer avec KUROSAWA sur deux autres films "La Forteresse cachée" et "Le Garde du corps" ainsi que sur "Duel à Ichijoji" de Hiroshi INAGAKI.

Maître reconnu et titulaire d’un 10ème DAN décerné par la Fédération Internationale des Arts Martiaux (IMAF) en 1981, Yoshio SUGINO enseigne souvent à l’étranger, principalement en France ou il conduit de nombreux stages sur l’invitation de son élève Alain FLOQUET.

En avril 1995, il vient à Paris pour participer à la Nuit des Arts Martiaux de Bercy où, par la pureté de son style et son extraordinaire vitalité pour un homme de 91 ans, il conquis le public qui l'ovationne.  

Maître SUGINO s'éteint le 13 juin 1998, à l'âge de 94 ans, après avoir confié la responsabilité de son dojo de Kawasaki à son fils, Maître Yukihiro SUGINO.

 

Yoshio SUGINO était l'un des derniers grands maîtres du Katori Shinto Ryu et il avait acquis la maîtrise de bien d'autres disciplines. Célèbre pour sa maîtrise technique et son kiai très puissant, il était aussi un professeur très exigeant et perfectionniste. Au Japon, il était aussi connu pour avoir été le conseiller technique de plusieurs films d'arts martiaux populaires, en y ajoutant le dynamisme et la réalité martiale. Il apparaissait fréquemment dans les médias comme un représentant du monde des arts martiaux anciens Japonais (Kobujutsu). De ces différentes manières, il contribua beaucoup à introduire l’aspect merveilleux des arts martiaux auprès du grand public…

 

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